ADHYATMA DARSHANAM
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MEDITATION: SESSION DE 19.10.2003
LA SCIENCE DE LA MEDITATION ET DE LA SPIRITUALITE COMME ENSEIGNEE PAR L’HINDOUISME.
Pendant la précédente session, on a parlé de la connaissance essentielle [veda] et finale [anta], connaissant quoi plus rien ne reste à savoir, le savoir suprême, parâvidyâ. Gâyatri est l’essence des Védas et des Oupanishads, qui traitent sur Aum, la Vérité Suprême, Aum Tat Sat. Védanta, comme la science de la spiritualité, nous enseigne la nature de la réalité et le moyen d’y arriver. Un aspect important de l’enseignement de Védanta est Koshavidyâ, la connaissance des enveloppes et potentiels [koshas] de l’âme. Kosha signifie aussi un coffre qui contient des trésors et richesses.
1. Annamaya kosha : le potentiel du corps physique, qui est fait de nourriture [Anna] et qui dépend de la nourriture pour se développer. Il vit dans la matière [bhou] et l’espace matériel des sens [bhoutâkash]. Annapourna, Shailapoutri. A ce niveau il y a un ego matériel, physique qui prédomine.
2. Prânamaya kosha : la puissance de l’enveloppe, du niveau subtil vital-émotionnel, où sont cachés nos impulsions, émotions, besoins qui ‘traversent’ notre corps et notre mental comme un souffle [Shiva, Roudra, Jatâdhara], un vent qui nous pousse à agir et réagir, quelque fois sauvagement. Il se situe dans l’espace subtil du subconscient où prédomine un ego passionnel, impulsif.
3. Mamomaya kosha : le potentiel du mental- le siège des sensations, de l’expérience, de l’orientation, de la mémoire active et de la pensée concrète. C’est le serviteur [gana] d’un individu et il agit comme un animal sociable. Il fonctionne dans l’espace conscient et subconscient [chittâkâsha]. C’est le monde de Ganesha, le serviteur. A ce niveau, il y a un ego mental impulsif qui prédomine.
4. Vignyânamaya kosha : le potentiel caché de l’intellect, de la raison, du discernement, de la pensée abstraite et de la personnalité. L’usage des facultés de ce plan de la conscience peut faire sortir l’homme de l’état animal et le rendre intelligent, sensible, conscient, moral et religieux. Il fonctionne dans l’espace du conscient rationnel [mahâkâsha]. C’est le monde de Soubrahmanya, le fils de Dieu. A ce niveau de la conscience, il y a un ego intellectuel, rationnel qui prédomine.
5. Anandamaya kosha : le potentiel complet inconscient du bonheur caché, de l’accomplissement. Au centre de ce plan de la conscience se trouve la porte cachée du bonheur en nous, dont seul le Gourou intérieur possède la clef mystique. C’est l’espace du sommeil inconscient et de la mort [layâkâsha]. A ce niveau, prédominent l’inconscient et un ego spirituel chez ceux qui ont pu atteindre ce niveau de la conscience.
Au delà des cinq potentiels [koshas], se trouve l’âme, la pure conscience dans sa perfection : Shiva, Brahmâ, Vishnou, Aum, etc. La clé du bonheur est appelée Gourouvâkyâ, Mâhâvâkyâ, Rishivâkyâ et Brahmavidyâ.
Il y a quatre Mâhâvâkyâs, qui symbolisent l’essence de Védanta ; chacune est issue d’un des quatre Védas. Dans les Pourânas, ils sont les quatre fils immortels et parfaits de Brahmâ qui sont exclusivement dévoués à Vishnou, l’Etre Suprême. Les mâhâvâkyâs sont :
1. Pragnyânam brahma : la capacité naturelle en nous qui donne la capacité de connaître, de savoir, de se reconnaître [Pragnyâ- la conscience pure] est le sacré, le suprême, l’adorable, l’immortel, l’incréé [Brahma].
2. Ayam âtmâ brahma : la base de notre existence, la Présence qui existe sans dépendre de rien ni de personne [âtmâ], est le sacré, le suprême, l’adorable, l’impérissable, l’incréé, le parfait [Brahma].
3. Tat tvam asi : en vérité c’est Cela ta vraie et suprême nature ; médites dessus comme ta réelle et suprême identité.
4. Aham brahmâsmi : le méditant a réalisé la vérité suprême [brahma] : Je suis [aham asmi] le sacré, le suprême, l’adorable, l’adorable, l’impérissable, l’incréé, satyam, shivam, soundaram. L’Etre Suprême Absolu [Brahma].
ILLUSTRATION :
Au fond de chaque mangue, il y a un noyau qui est issu d’un noyau primordial, et chaque noyau est identique au noyau originel. De la même manière, au fond de la source en chacun d’entre nous, il y a la graine de la divinité [hiranyagarbha, atmâ, shiva, aum], qui est identique à l’Etre Suprême [brahma]. Cette graine de la divinité se trouve au fond du ânandamaya kosha, la source, dont la majorité des gens sont inconscients. Elle est Savitour, Sâvitri. Mais elle est couverte par le voile obscur de l’inconscience et de l’ignorance.
Anandamaya kosha, le potentiel spirituel caché, peut être réveillé à travers satsanga [rencontre spirituelle], vichâra [la réflexion], seva [le service désintéressé] et yoga [la pratique spirituelle]. Anandamaya, la source en nous, est enveloppé par obscurité [andhaka], ignorance [avidyâ], le sommeil, la mort [antakâla] et le bonheur complet [ânanda]. Obscurité, ignorance, sommeil et la mort sont de la nature de tamas, le blocage dans l’incompréhension, l’indifférence, la négligence, l’inconscience, mâyâ, et la frayeur de la mort. Tamas est le symbole de Shiva comme Roudra, le terrible.
La méditation, dhyâna, nous entraîne à faire face au Tamas et à le dépasser en restant éveillé et en développant la pure conscience [dhy]. C’est cela le Tapas, atteindre le Tapoloka. On va constamment à la recherche de la pure conscience éveillée [gangâ- gam gam : qui va et vient] et on la déverse sur Anandamaya, la source obscure en nous, le symbole de Shiva, Shivalingam. Ainsi on atteint Shiva, le père du monde enveloppé par l’obscurité et on se fusionne en Lui. On devient Shiva, shivo’ham. On fait face à la mort, on la traverse et on atteint l’immortalité [mrityoun-jaya]. Tryambakam yajâmahe sougandhim poushti vardhanam, ourvâroukam ivâ…Donc armé de brahmavidyâ, la connaissance de Védanta, on tourne l’attention, le dhy, complètement au centre de Anandamaya kosha, la source en nous et que nous sommes, la porte vers l’au-delà, vers Shiva, que nous sommes également. Que voit-on ? –
L’espace noir qui emplit notre corps, le corps noir de Shivji. On met de côté l’instinct animal [Nandi], qu’on met au repos et l’énergie du corps est accumulée et canalisée vers l’espace noir, le lingam : la source et la fin. On met les trois gounas au repos [trishoula] : la paresse [tamas], l’excitation [rajas] et la réflexion mentale [sattva]. On reste dans le silence intérieur [damarou]. L’attention [dhy] est maintenue ici et maintenant [âna]. Ceci est symbolisée par le roudraksha mâlâ [chapelet] que Shivji tient entre ses doigts.
On élimine [ari] l’identification au corps physique, aux objets externes et aux images internes du mental [tripoura]- Tripourâri. Tripourâri signifie aussi le dépassement [ari] des trois états limités : celui du monde matériel de l’éveil, du monde des rêves, du monde du sommeil profond. Ainsi on pénètre la quatrième dimension : Touriya, le monde spirituel. La parole, la pensée et l’action [tridala bilva : les feuilles préférées de Shiva] sont complètement soumis à l’espace infini de la Source.
La forme de l’espace noir, que nous sommes, est en réalité sans forme, sans frontière, paisible, symbolisée par le shivalingam. On garde l’esprit éveillé au trikouti, le regard uniquement sur ânandamaya, l’espace de la conscience profonde ; on est le témoin détaché de tout [sâkshi]. Ceci est représenté par le symbole tri-linéaire de Shiva avec un œil mystique au centre figurant sur le shivalingam.
L’énergie est accumulée et maintenue au niveau de l’esprit comme indiqué par le serpent qui serre le cou de Shivji. L’activité mentale est réduite au strict minimum [croissant de la lune au dessus de sa tête]. On ressent la pure conscience éveillée [gangâ] qui émane du fond de l’espace noir que nous sommes [la rivière d’eau sacrée émergant de la tête de Shivji]. Confronté à cet espace obscur infini [mahâkâli], le désir et la pensée [kâma] sont réduits en cendre [kâmadahana : Shivji brûlant le dieu Kâma, qui a perturbé sa méditation].
On reste dans le présent qui est la réalité universelle [satyamaya] ; immobile, conscient [chinmaya] de tout sans intervenir, sans description, libre, calme, paisible. C’est l’état de Shiva, notre premier état supérieur immortel. On a déjà une vision de l’âme, mais elle est encore voilée par une fine couche d’ignorance, d’obscurité spirituelle. Observons plus attentivement.
Cet espace qui se présente à notre attention intérieure est au-delà du mental, des pensées et de l’intellect et qui en même temps les pénètre et les anime. C’est ici que se trouve le potentiel intégral caché et non manifesté [avyakta] de l’être humain [jiva]. Pendant notre état d’éveil ordinaire, nous ne sommes presque jamais conscient de l’espace. Notre attention est toujours braquée sur les objets que contient cet espace. En fermant les yeux, on ne fait qu’éliminer les objets pour focaliser l’attention principalement sur l’espace causal infini.
*Observez bien attentivement et vous verrez que cet espace est sans commencement, sans milieu et sans fin. Il est sans mesure, sans borne, sans frontière, sans naissance, sans vieillissement, sans âge, sans couleur, sans nom, sans partition, sans genre. La conscience spirituelle, qui est cet espace, est ni mâle ni femelle; elle est sans nationalité, sans race, sans espèce. Il y fait ni jour ni nuit, ni chaud ni froid car elle est au-delà du temps et du climat. Elle est sans activité et absolument immobile et constante. Elle ne grossit pas et ne se rétrécit pas. Elle n’apparaît pas, ne disparaît pas; elle est toujours là, comme le témoin détaché, silencieuse, éternelle, incréée. Elle est ici et partout. Tout est en elle et elle pénètre tout sans distinction. Elle n’appartient à rien ni à personne.
*Vous pouvez voir une image de votre corps dans cet espace infini de la conscience, dans l’être. Vous pouvez aussi y voir toute l’humanité et tout l’univers- avec un peu d’intuition. Malgré le fait qu’elle contienne tout l’univers (poûrnam/ plenum), elle apparaît comme vide (shounyam/ vacuum). Cet espace semble être en vous et pourtant il contient tout l’univers, y compris votre personne. Sans cet espace, et en dehors de cet espace, rien ne peut exister.
*Dans cet espace de pure conscience [chid âkâsh], il n’y ni intérieur ni extérieur; il est sans division, sans fragmentation, sans dualité. Il est éternel et infini comme l’âme, comme Dieu. Considérez cet espace causal comme le temple éternel de l’Etre Divin et vous êtes cet espace éternel et infini, le temple de Dieu. C’est cela La Contemplation : atteindre le temple de notre état supérieur. Cet espace sombre est aussi considéré comme le coeur spirituel d’une personne et quand cette personne ouvre ce coeur totalement à l’au-delà, à l’être qu’il est en vérité, c’est l’exercice de la Confession, qui permet le repentir: le retour vers la Lumière Divine.
*L’espace intérieur revêt cette apparence sombre [shyâmavarnam] par ce qu’il y a un voile de l’ignorance et de l’inconscience qui couvre la pure conscience dans cet espace infini. En vérité ce qu’on appelle la conscience individuelle n’est qu’un bulle éphémère dans cet océan de conscience infinie. Avec l’éclatement de ce bulle, ce voile de l’ignorance est détruit et on se fusionne avec la Lumière Infinie et Eternelle de l’Etre Divin [que nous sommes en vérité] comme une graine de sel qui se dissout dans l’océan pour devenir l’océan. On appelle cet état La Divine Communion- Samâdhi. Samâdhi signifie que la conscience spirituelle [dhi] s’est complètement fusionnée avec l’Etre et ne fait qu’un [samâ] avec l’Etre -So’ham, Shivo’ham.
*Maintenant observez la respiration et vous verrez que cet espace infini se manifeste à travers le souffle de la vie et indique sa présence à travers la respiration [So’ham: Je suis Cela]. Cet espace, qui est la vie, est vivant [sat], supraconscient [chid] et complet [ânanda]. La mémoire du moi et du corps s’est effacée. Il n’y plus de moi ni de corps individuel. Il y a seulement l’espace infini, vivant [sat] supraconscient [chid] qui respire dans la satisfaction totale [ânanda] de son être. Ce souffle sans forme est attentif à tout ce qui se passe dans le mental et dans l’entourage, sans aucune résistance. Il accepte et absorbe tout et ne rejette rien. Il n’y a pas de jugement ni de choix. Il voit tout et connaît tout. Toute activité est comme une vague de l’océan, une expression particulière de l’unique Etre. Toute activité est comme une simple perturbation à la surface de l’Etre.
*Si vous vous identifiez à l’espace de la pure conscience et le moment présent, vous êtes L’INSTANT ETERNEL [sat] avec tout ce qu’il comporte et contient. Vous êtes le matin, le soir, les chants d’oiseaux, les voix qui appellent, les bruits, l’espace et le temps, les pensées et vous êtes, en même temps, le Témoin Silencieux de tout cela. Océan et vagues. Il faut tout simplement ETRE dans le moment présent, Etre le moment présent, sans songer ni au passé ni au futur. C’est cela le secret de Adhyâtmâ Darshanam.
La méditation, la communion dans l’espace de la pure conscience silencieuse, peut aussi se faire et se prolonger dans la position endormie [shavâsana]; mais on doit rester très conscient et attentif afin de ne pas sombrer dans le sommeil. Toutefois, si on est fatigué et que le sommeil nous envahisse, cela ne peut qu’être bénéfique. Il ne faut jamais résister ni créer des tensions inutiles pendant la méditation. Quelques exercices vigoureux avant la méditation peuvent certainement empêcher le sommeil de s’emparer de nous.
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Si vous avez fait cette expérience comme décrite dans ce chapitre, alors vous avez fait l’expérience de la Méditation. Et à travers cette expérience de la méditation, vous avez communié avec l’âme, l’Etre Suprême, Dieu, Paramâtmâ. En effet, c’est ça le but de la méditation. Elle harmonise les trois aspects de la nature, notamment, Sattva [esprit silencieux et éveillé], Rajas [activité respiratoire non agitée] et Tamas [posture immobile du corps]. A travers cette harmonisation, une grande quantité d’énergie [tapas] est accumulée et on peut ainsi mourir au particulier pour renaître comme l’Universel. C’est cela la conscience cosmique. On perd son individualité; on est une présence indivisible, intemporel, immuable et incommensurable.
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Le yogi doit constamment faire le pèlerinage vers cet océan de la pure conscience en lui. Il doit acquérir cette pure conscience et la déverser constamment dans cet immense [mâhâ] espace obscur [shivarâtri] et sans forme de la paix [shambhou] qui rayonne la paix [shamkara]. On doit rester éveillé [la veillée], faire face à cet infini espace de l’obscurité et de la mort [mâhâshivarâtri] et le traverser afin de pouvoir atteindre l’espace de l’immortalité et de l’illumination [sadâshiva]. C’est l’étape de Abhishekam. Abhi : fraîchement, shekam : instruit, illuminé, réalisé, baptisé.
C’est l’étape de Dhyâna. Dhy= attention pure éveillé [chit] ; â= maintenant, espace [âkâsha] ; na= rien d’autre, sans interférence de la pensée, du penseur et du désir. Chidâkâsha Dhyâna. Dhyâna est le septième membre de Yoga après yama, niyama, âsana, prânâyâma, pratyâhâra et dhâranâ. Cette septième étape est vraiment extraordinaire et magique comparé aux précédentes.
Dans les Pourânas [Shrimad Bhâgavatam], Dhyâna, l’étape de la conscience méditative, est représentée par Balarâma Shankarshana, le septième fils de Devaki [le potentiel spirituel qui procure l’immortalité] et Vasoudeva [la richesse spirituelle qu’on accumule grâce à la pratique]. Kamsa [ego, ignorance] ne peut l’approcher, ni le vaincre. Kamsa, l’ego matériel, a réussi a éliminer les six premiers enfants de Devaki et Vasoudeva, les six premiers pas du Yoga. La méditation, la septième pas du Yoga, effectue un transfert miraculeux de Devaki à Rohini avec l’aide de Yogâmâyâshakti, la force incompréhensible de Yoga. Rohini est la douce lumière de la conscience éveillée, la deuxième femme [force dynamique] de Vasoudeva. De la prison du monde mortel, la conscience méditative est transportée [shankarshana] dans un espace libre et pur [gokoula, vrindâvana]. La méditation possède une force extraordinaire [bala] qui conduit au vrai bonheur [sham, râma].
Mais cette septième étape n’est pas la finalité du Yoga car vaincre la mort [mrityounjaya] ne signifie pas la libération, la perfection. Il y a encore du chemin à parcourir. Quand la méditation va s’approfondir, l’identité individuelle [hima- la neige, l’image congelée, jîva, jîvânda] sur lequel l’espace méditatif [shankara] repose va se fondre et se liquéfier. Il perdra sa forme individuelle particulière et se répandra dans les quatre directions de l’univers [brahmânda], les quatre visages de Brahmâ.
AUM TAT SAT